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Comprendre

S’informer sur la violence au travail permet aux travailleuses et travailleurs de mieux la reconnaître, la prévenir et la gérer efficacement.

QU’EST-CE QUE LA VIOLENCE AU TRAVAIL?

Selon l’Organisation internationale du travail (OIT)1, la violence au travail réfère à toute action, tout incident ou tout comportement qui s’écarte d’une attitude raisonnable par lesquels une personne est attaquée, menacée, lésée ou blessée, dans le cadre ou du fait direct de son travail.

La violence au travail interne est celle qui se manifeste entre les travailleurs, y compris le personnel d’encadrement.

La violence au travail externe est celle qui s’exprime entre les travailleurs (et le personnel d’encadrement) et toute autre personne présente sur le lieu de travail.

LES DIFFÉRENCES ENTRE LES FEMMES ET LES HOMMES SELON LE TYPE D’ACTE DE VIOLENCE GRAVE (AVG)

Selon les données provenant des déclarations officielles­­7, les femmes (représentant entre 53 % et 75 % des cas) sont davantage victimes d’AVG au travail que les hommes. Par contre, les victimes d’homicides sont majoritairement des hommes (environ 82 % des cas d’homicides au travail).

Cette différence s’explique en partie par le fait que les hommes sont beaucoup plus souvent victimes d’attaques avec une arme. En effet, selon une étude, ils représenteraient 93 % des victimes d’attaques avec une arme blanche et 97 % des victimes d’attaques avec une arme à feu. Les femmes seraient quant à elles plus à risque d’être victimes de voies de fait simples (84 % des victimes).

Selon les données provenant d’enquêtes de victimisation, dans le secteur de la santé­­8, il n’y a pas de différences significatives entre les hommes et les femmes concernant l’exposition aux AVG. Cependant, pour certaines catégories d’emploi, des différences sont observées. La plupart des données montrent que les hommes seraient davantage victimes d’AVG que les femmes parmi les infirmiers. Les résultats sont plus mitigés concernant les médecins, puisque certaines études indiquent que les femmes sont plus à risque, d’autres montrent que les hommes sont plus à risque et d’autres concluent qu’il n’y a pas de différences significatives. Il est donc difficile de déterminer si les hommes médecins sont plus à risque que leurs consœurs d’être victimes d’AVG, ou vice versa.

Selon les données provenant d’enquêtes de victimisation, dans les autres secteurs­­9, les hommes sont plus à risque que les femmes d’être victimes d’un AVG au travail. À cette conclusion s’ajoutent toutefois les résultats d’une étude concernant les forces de l’ordre et le secteur des transports : les femmes travaillant dans ces secteurs sont plus à risque que leurs homologues masculins d’être victimes de voies de fait.

En outre, une étude regroupant plusieurs secteurs d’activité détaille les blessures et les coûts liés aux AVG au travail selon le sexe des victimes. Les résultats indiquent que les hommes sont plus à risque de subir des blessures, mais on dénombre toutefois plus de temps de travail perdu pour les femmes.

LA VIOLENCE AU TRAVAIL, DES CHIFFRES QUI PARLENT

Selon les données de Statistique Canada2, il y a environ 350 000 cas de violence au travail chaque année au Canada.

Selon un sondage réalisé auprès de 2 889 travailleurs au Québec en 20123:

  • 67 % ont été victimes ou témoins d’au moins une forme de violence au travail (femmes 65 % / hommes 69 %);
  • 31 % ont été victimes ou témoins d’actes de violence grave (femmes 28 % / hommes 35 %);
  • 20 % des femmes / 33 % des hommes subissent une blessure physique à la suite d’un acte de violence en milieu de travail.

En 2012, 70,3 % des lésions attribuables à la violence en milieu de travail et acceptées par la Commission de la santé et de la sécurité du travail (CSST) touchaient des femmes. Les travailleuses du milieu de la santé et des services sociaux étaient les plus affectées par la violence en milieu de travail avec 33 % des lésions.

LES COÛTS PSYCHOLOGIQUES DE LA VIOLENCE AU TRAVAIL PLUS MARQUÉS CHEZ LES FEMMES

Selon un sondage réalisé auprès de 2 889 travailleurs au Québec en 20123, la violence au travail a un coût personnel élevé pour les victimes et les témoins. Elle peut engendrer des conséquences psychologiques telles que…

  • des flashbacks (femmes 38 % / hommes 32 %);
  • des cauchemars (femmes 24 % / hommes 24 %);
  • de l’évitement (femmes 34 % / hommes 29 %);
  • une perte d’intérêt (femmes 17 % / hommes 17 %);
  • un sentiment de culpabilité (femmes 28 % / hommes 25 %);
  • de l’irritabilité (femmes 36 % / hommes 42 %);
  • des troubles du sommeil (femmes 31 % / hommes 34 %);
  • de l’hypervigilance (femmes 49 % / hommes 33 %);
  • des difficultés de concentration (femmes 29 % / hommes 22 %).

DES DIFFICULTÉS AU TRAVAIL POUR LES VICTIMES ET LES TÉMOINS

Selon un sondage réalisé auprès de 2 889 travailleurs au Québec en 20123, les victimes et témoins de violence au travail peuvent avoir des difficultés au travail telles que…

  • des absences (femmes 8 % / hommes 8 %);
  • une baisse de productivité (femmes 15 % / hommes 18 %);
  • des arrêts de travail (femmes 9 % / hommes 9 %);
  • des transferts (femmes 2 % / hommes 4 %).

LES STRATÉGIES UTILISÉES PAR LES TRAVAILLEUSES ET TRAVAILLEURS POUR RETROUVER UN FONCTIONNEMENT NORMAL AU TRAVAIL

Selon un sondage réalisé auprès de 2 889 travailleurs au Québec en 2012­­10, plus de 90 % des travailleuses et travailleurs ont déclaré avoir parlé d’un AVG vécu au travail avec une personne de leur environnement personnel ou professionnel. Toutefois, 53 % des hommes et 61 % des femmes ont rapporté qu’ils avaient également préfère éviter des lieux ou des personnes leur rappelant l’événement dont ils avaient été́ victimes ou témoins. Ceci correspond à une stratégie d’évitement, qui peut elle-même entrainer des conséquences psychologiques à long terme.

PARLER DE LA VIOLENCE AU TRAVAIL AVEC SES COLLÈGUES, À QUOI ÇA SERT?

Dans certaines situations, on ne sait pas si c’est une bonne idée de parler de la violence à son employeur. On a peur d’être jugé, on éprouve de la difficulté à extérioriser ce que l’on ressent, on craint que cela ne soit pas assez grave.

Si cela se produit, il est important de se tourner vers d’autres personnes, comme ses collègues ou ses proches, pour…

  • extérioriser ses émotions et analyser l’événement;
  • se rendre compte que l’on n’est pas seul à vivre de telles situations;
  • obtenir du soutien de leur part et s’entraider;
  • évaluer l’intérêt de déclarer l’acte de violence à l’employeur.

DÉCLARER LES ACTES DE VIOLENCE À SON EMPLOYEUR, À QUOI ÇA SERT?

Déclarer un acte de violence permet pour soi-même de…

  • verbaliser et d’extérioriser ses émotions.
  • comprendre ce qui s’est passé.
  • être reconnu officiellement en tant que victime ou témoin.
  • bénéficier du dispositif de soutien mis en place par l’employeur (comme des jours d’arrêt avec solde, l’accès au programme d’aide aux employés).

Si toutes les victimes déclaraient la violence, cela permettrait de…

  • développer des outils de prise en charge pour le rétablissement de la victime ou du témoin.
  • créer et de développer des programmes de prévention et de formation.
  • faire prendre conscience du problème au-delà des organisations de travail.
  • améliorer les politiques gouvernementales en la matière.

DES EXEMPLES DE VIOLENCE AU TRAVAIL

Voici quelques comportements qui sont considérés comme de la violence :

  • se faire menacer de mort ou de blessures;
  • se faire frapper ou pousser;
  • se faire lancer un objet;
  • subir des attouchements sexuels ou une agression sexuelle;
  • se faire égratigner ou pincer;
  • se faire cracher dessus;
  • se faire crier des insultes;
  • recevoir des messages ou des courriels de menace;
  • se faire ridiculiser ou humilier;
  • se faire intimider physiquement (p. ex. : se faire montrer le poing);
  • subir des dommages matériels.

LA « VRAIE » VIOLENCE QUOTIDIENNE

Les homicides et les blessures par balle sont des exemples extrêmes de ce qu’est la violence au travail. Les médias s’emparent régulièrement de ces faits divers, car ils génèrent beaucoup d’émotions, comme des sentiments d’horreur et de stupéfaction. Pourtant, ce type de violence ne représente qu’une minorité des actes de violence au travail.

La violence au travail au quotidien, c’est plutôt…

  • un patient qui insulte sa soignante et lui crache dessus parce qu’il ne veut pas prendre son traitement;
  • un client qui frappe un chauffeur d’autobus, car ce dernier lui demande de payer son titre de transport;
  • un automobiliste qui intimide physiquement un policier, car ce dernier lui demande le certificat d’immatriculation de son véhicule.

LA VIOLENCE INTERNE

Il est parfois difficile d’identifier les situations de violence lorsqu’elles se produisent entre collègues (violence horizontale) ou entre un supérieur et un subordonné (violence verticale).

Conflit ou violence? Droit de gérance ou violence? Quels sont les facteurs de risque?

Le site de l’Institut de recherche en santé et sécurité au travail propose des pistes de réponses et propose un portrait des principaux facteurs de risque associés à l’organisation du travail (charge de travail et demande psychologique, autonomie décisionnelle, soutien social et reconnaissance au travail).

Des exemples de situations problématiques

La Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail a mis en ligne des capsules vidéos pour illustrer des types de situations problématiques pouvant se présenter en milieu de travail ainsi que les moyens qui auraient pu être pris pour les régler.

La première capsule démontre l’importance pour un gestionnaire de prendre en charge une situation problématique vécue entre deux employés avant que celle-ci ne dégénère et se transforme éventuellement en harcèlement psychologique.

La deuxième montre comment des changements organisationnels peuvent entraîner des difficultés d’adaptation, donnant l’impression d’un abuse d’autorité et  de harcèlement psychologique.

La troisième illustre une situation de harcèlement psychologique au travail où l’employeur intervient. L’employé se sent blessé dans sa dignité et il est tourmenté au point de démissionner.

La quatrième illustre une situation de harcèlement psychologique au travail où l’employeur n’intervient pas. Cette situation a rendu son milieu de travail néfaste.

Pour visionner les capsules vidéos

L’IMPORTANCE DE SE FAIRE AIDER

Quand on est victime de violence au travail, on n’a pas forcément envie d’en parler à son entourage pour des raisons très variées. Par exemple, on peut avoir du mal à mettre des mots sur ce que l’on ressent. On peut considérer que ce n’était pas « si grave que ça » malgré les conséquences subies. On peut également ne pas vouloir déranger les autres ou avoir peur d’être jugé en parlant de ce qui s’est passé.

La violence au travail peut générer de nombreux bouleversements chez une victime ou un témoin. Elle peut avoir des effets dévastateurs et perturber un individu. Le soutien social est essentiel pour briser l’isolement. Le soutien social, c’est le fait d’aller vers un tiers pour obtenir du soutien et une écoute. Ce tiers peut être un membre de votre travail, un proche, une connaissance ou un professionnel.

De nombreuses études montrent que le fait de recevoir du soutien et une écoute permet notamment de diminuer les risques de dépression, d’anxiété, de stress post-traumatique et de détresse psychologique.

L’OBLIGATION LÉGALE DES EMPLOYEURS

Les employeurs ont l’obligation légale de prévenir la violence au travail, de fournir un milieu de travail sécuritaire à leur personnel, c’est-à-dire un milieu sans violence. Ils doivent protéger leurs travailleurs contre la violence au travail4.

QUI EST PLUS À RISQUE?

Les personnes qui sont le plus à risque de vivre de la violence au travail sont celles qui…6

  • travaillent avec le public;
  • manipulent de l’argent, des objets précieux, des médicaments d’ordonnance;
  • accomplissent des tâches d’inspection;
  • offrent des services, des soins, des conseils;
  • s’occupent de personnes instables ou changeantes;
  • travaillent seules ou en petits groupes;
  • travaillent à l’extérieur du lieu de travail traditionnel;
  • ont un lieu de travail mobile;
  • travaillent durant des périodes de changements organisationnels intenses;
  • sont au travail tard en soirée ou tôt le matin;
  • travaillent à des moments stressants de la semaine, du mois ou de l’année (p. ex. : le 1er du mois, Noël);
  • accomplissent des activités qui peuvent augmenter le niveau de stress.

LA VIOLENCE AU TRAVAIL PEUT ENGENDRER DES CONSÉQUENCES AU TRAVAIL

La violence au travail a un coût élevé pour les employeurs. L’indemnisation des travailleurs (lésions psychologiques et physiques) représente à elle seule des coûts de 8 à 10 millions de dollars par année pour l’ensemble des organisations au Québec5.

La violence au travail peut également…

  • ternir l’image d’une organisation;
  • augmenter le taux d’absentéisme;
  • nécessiter des arrêts de travail;
  • occasionner une baisse de la productivité;
  • engendrer un roulement de personnel;
  • être coûteuse en indemnisation;
  • détériorer le climat de travail.

LIENS

Documentaire Des soins aux poings sur la violence au travail dans le secteur de la santé. Stéphane Guay, directeur du centre d’étude sur le trauma explique les résultats des recherches sur le sujet.

Voir le documentaire

Lydia Forté, criminologue, présente des résultats issus de ses recherches dans une conférence intitulée  Intervenir dans un contexte où la violence envers un intervenant est possible : comment moduler sa peur?

Voir la conférence

Extrait de l’émission Une pilule, une petite granule sur la violence en milieu de travail. Des travailleurs du milieu de la santé et du transport public témoignent. Stéphane Guay, directeur du centre d’étude sur le trauma, donne son avis d’expert.

Voir l’extrait

Stéphane Guay, directeur du centre d’étude sur le trauma, présente un Webinaire sur les conséquences psychologiques de la violence au travail.

Voir le Webinaire

1 Organisation internationale du travail. (2003). Recueil de directives pratiques sur la violence au travail dans le secteur des services et mesures visant à combattre ce phénomène. Genève: Bureau international du travail.

De Léséleuc, S. (2004). Criminal Victimization in the Workplace (Canadian Centre for Justice Statistics Profile Series). Ottawa, Ontario , Canada: Statistics Canada.

3, 10 Équipe de recherche VISAGE. (2012). Fiche résultat « Sondage dans trois secteurs professionnels ». http://www.equipevisage.ca/outils/sondage-trois-secteurs

4 Charte des droits et libertés de la personne (art. 46), Code civil du Québec (art. 2087) et Loi sur la santé et la sécurité du travail (art. 9 et 51).

Institut de recherche Robert-Sauvé en santé et en sécurité du travail (IRSST).  http://www.irsst.qc.ca/prevention-violence/concernes.html

Centre canadien d’hygiène et de sécurité au travail (CCHST). http://www.cchst.ca/products/courses/violence_awareness/

­­7, 8, 9, 10 ­­Équipe de recherche VISAGE. (2014). Fiche résumé «Résumé – Les hommes et les femmes face à la violence au travail : les risques d’exposition ». http://www.equipevisage.ca/outils/resume-les-hommes-et-les-femmes-face-a-la-violence-au-travail-les-risques-dexposition/