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La violence au travail est un problème tabou. Les travailleuses et travailleurs, victimes ou témoins d’actes de violence, adhèrent bien souvent à des mythes sur le sujet, ce qui fait partie des raisons pour lesquelles ils ne déclarent pas les actes de violence vécus au travail.

Les femmes sont plus affectées par la violence que les hommes.

Réalité – Plusieurs recherches traitant des conséquences associées à la victimisation montrent que le risque de développer un état de stress post-traumatique à la suite d’un acte de violence serait deux fois plus élevé chez les femmes que chez les hommes.

Toutefois, les mêmes études montrent que les femmes composent mieux avec ces conséquences. En effet, les femmes vont avoir tendance à donner un sens à l’agression vécue et à aller chercher de l’aide. Les hommes, quant à eux, ont tendance à se remettre en question. Les pressions sociales exigent souvent qu’ils soient forts devant la violence. Être affectés signifie donc qu’ils n’ont pas été suffisamment solides face à l’agression, ce qui engendre alors une diminution de la confiance en soi. De ce fait, les hommes tendent à vivre seuls leurs conséquences plutôt que de solliciter de l’aide.

Les femmes craignent davantage que les hommes de se plaindre de la violence en milieu de travail.

Mythe – L’équipe de recherche VISAGE a mené une étude auprès de 1 141 travailleurs du secteur de la santé et des forces de l’ordre du Québec en 2012 visant notamment à identifier les facteurs de prédiction de la banalisation de la violence au travail. Aucune différence ne fut constatée quant à la perception du tabou : les deux sexes croient qu’ils seraient jugés s’ils se plaignaient de la violence en milieu de travail. Toutefois, les femmes œuvrant pour les forces de l’ordre craignent deux fois plus que leurs collègues masculins d’être stigmatisées comme « incompétentes » si elles se plaignaient de la violence. À l’instar, les résultats montrent que les hommes de l’étude auraient tendance à normaliser davantage la violence que les femmes.

Ces résultats sont inquiétants surtout pour les femmes. En effet, si celles-ci, par crainte de se faire juger par leurs collègues ou leurs supérieurs, s’isolent et ne vont pas chercher l’aide psychologique et mentale dont elles auraient besoin à la suite d’une victimisation, elles souffriront davantage, et ce, en silence. Ainsi, ce tabou peut donc exacerber les conséquences psychologiques pour les femmes, car il inhibe une stratégie d’adaptation naturelle aux femmes, à savoir la recherche de soutien.

Déclarer la violence, ça ne changera rien.

Mythe – Certaines personnes considèrent que le fait de déclarer les actes de violence dont elles ont été victimes ou témoins ne changera rien. Elles pensent que la violence au travail est inévitable et qu’il faut apprendre à vivre avec celle-ci. Elles pensent aussi que le mal est fait, que l’agresseur ne sera jamais sanctionné, que l’employeur ne pourra rien faire, que c’est une perte de temps et que c’est trop compliqué.

Déclarer les actes de violence en tant que victime ou témoin permet de bénéficier de mesures de soutien et d’agir de manière concrète pour éviter que de tels actes se reproduisent. Cela permet également à l’employeur de mesurer l’ampleur du phénomène et de renforcer les mesures de sécurité. Si les actes de violence ne sont pas rapportés, l’employeur peut supposer qu’il n’y a pas de problème et, ainsi, diminuer les moyens accordés à la prévention de la violence au travail. Il est important de garder à l’esprit que l’implantation de nombreuses mesures de prévention dépend en grande partie du nombre de déclarations officielles. C’est notamment le cas des programmes de soutien aux victimes, des programmes de formation aux employés, du renforcement de dispositifs de sécurité (p. ex. : caméras de surveillance). Ces mesures sont prises et sont ajustées dans le temps, notamment en fonction du nombre d’actes rapportés. Déclarer la violence, ça fait bouger les choses!

Demander de l’aide, c’est être faible.

Mythe – Certaines personnes victimes ou témoins d’actes de violence grave considèrent que demander de l’aide est une preuve de faiblesse ou ont peur d’être jugées comme étant incapables de gérer leurs problèmes seules. Elles se persuadent qu’elles n’ont pas besoin d’en parler malgré leurs séquelles (psychologiques ou liées à leur fonctionnement au travail) et que ces séquelles vont passer avec le temps, ce qui est en partie vrai.

Demander de l’aide est une démarche extrêmement difficile, qui nécessite beaucoup de courage. En effet, cela nécessite de s’avouer à soi-même avoir vécu un événement difficile et de ne pas pouvoir faire face aux conséquences seul. Plusieurs études montrent que les personnes qui demandent de l’aide arrivent à surmonter plus rapidement les conséquences liées à l’acte de violence. Ces personnes éprouvent moins longtemps des symptômes de dépression, de stress et d’anxiété. Demander de l’aide, c’est se donner la chance de se rétablir plus vite!

On est payé pour subir la violence, ça fait partie de nos tâches.

Mythe – Certains employés se font dire ou pensent que leur salaire justifie l’agressivité qu’ils subissent de la part d’usagers. Pour cette raison, ils acceptent les menaces et les coups, en les considérant comme faisant partie de leurs tâches. Si le fait de banaliser la violence peut permettre de mieux endurer son quotidien au travail, il est important de garder en tête que personne n’est payé pour être victime ou témoin d’actes de violence.

De nombreuses raisons peuvent nous pousser à choisir un certain type d’emploi. Par exemple, cela peut être pour venir en aide à son prochain, améliorer la sécurité, faciliter le quotidien des usagers, etc. Toutefois, personne ne choisit un emploi pour subir des agressions. Pour de nombreuses raisons liées à l’environnement, aux types de tâches, à la population servie, la violence fait partie des risques associés à l’emploi. Même si elle est particulièrement présente dans certains milieux de travail, elle ne doit pas être acceptée comme « faisant partie de la job ». Elle doit être dénoncée pour faciliter l’implantation et le maintien de politiques anti-violence.

Être témoin de violence peut entraîner des conséquences psychologiques.

Réalité – Certaines personnes pensent que le fait d’être témoin d’un acte de violence n’entraîne pas de conséquences. Elles considèrent que si l’on n’a pas subi directement de la violence, on peut oublier plus facilement et passer à autre chose.

De nombreuses recherches montrent que les témoins de situations de violence peuvent également subir des conséquences, même si leur nombre est généralement inférieur à celui des victimes. Ils peuvent notamment avoir des flashbacks fréquents, faire de l’insomnie, développer un sentiment de culpabilité. Dans certains cas, la violence au travail peut être aussi dommageable pour la victime que pour le témoin.

La violence au travail peut mener à un état de stress post-traumatique.

Réalité – Certaines personnes croient que la violence au travail ne peut pas causer de séquelles psychologiques. Elles pensent que la violence a des répercussions physiques uniquement.

En plus de pouvoir provoquer des blessures physiques, la violence au travail entraîne de nombreuses conséquences psychologiques (p. ex. : anxiété, cauchemars, dépression). Ces conséquences peuvent persister dans le temps, surtout lorsque l’on ne se fait pas aider, et causer un état de stress post-traumatique, c’est-à-dire un type de trouble de santé mentale sévère qui peut se développer à la suite d’une expérience traumatisante. Les travailleurs régulièrement exposés à des événements traumatiques peuvent être plus vulnérables à développer un état de stress post-traumatique. Lorsqu’un travailleur vit des événements traumatiques à répétition, il n’a pas toujours le temps de reprendre des forces et de s’adapter ou il n’a pas les capacités de bien gérer le stress extrême et récurrent. Si, dans sa vie personnelle ou au travail, il éprouve des difficultés majeures, cela peut devenir un facteur de risque accru. Ce travailleur peut ainsi être affecté et devenir également plus vulnérable à d’autres troubles psychologiques.

La violence au travail, ça peut toucher tout le monde. 

Réalité – Certaines personnes pensent que la violence touche seulement le personnel qui travaille pour le maintien de l’ordre, par exemple les policiers. Elles ne conçoivent pas que la violence puisse être présente dans d’autres secteurs professionnels.

La violence en milieu de travail est un problème qui touche tous les secteurs professionnels. Certains travailleurs seraient cependant plus à risque d’être victimes ou témoins d’actes de violence, notamment ceux qui sont en contact avec des personnes instables ou en détresse, qui font la manutention d’argent, qui exercent un travail dont le lieu est mobile ou qui sont responsables de l’application de règlements. Le nombre de victimes et de témoins de violence au travail a été particulièrement élevé dans certains secteurs. Les résultats obtenus auprès des répondants d’un sondage mené par l’équipe de recherche VISAGE indiquent que la violence peut toucher jusqu’à 81 % du personnel soignant, 80 % des chauffeurs d’autobus et chauffeuses d’autobus, 77 % des policiers et des policières. Autant les femmes que les hommes peuvent subir un acte de violence au travail.

On peut prévoir si la personne en face de nous peut devenir violente.

Réalité – Certaines personnes pensent qu’il est impossible de prévoir les comportements agressifs, de mettre fin à l’escalade de la violence.

Heureusement, il est possible de distinguer des signes précurseurs à la violence (p. ex. : poings serrés, débit accéléré, ton de voix haussé, propos irrationnels ou menaçants). Les formations sur la prévention de la violence peuvent aider les travailleurs à identifier ces signes et à prévenir l’escalade de la violence. Par ces formations, les travailleurs apprennent à interagir de façon pacifique et sécuritaire avec un interlocuteur agressif.